mercredi 30 septembre 2009

Ce soir

Ce soir, les locataires du troisième cuisinent du romarin. Y a des fragrances jusque sur le pallier.

Ce soir, il y a toujours 19 marches entre les deux premiers étages, 18 entre les suivants. Je ne sais pas pourquoi.

Ce soir, je rentre tard. Mon chat me fait la gueule. Je fais pareil, y a pas de raison.

Ce soir, je ne fume pas. Il est 23 heures, j’arrête jusqu’à demain.

Ce soir, j’écoute Miossec et je me demande à quoi pensent les joggers du dimanche.

Ce soir mon téléphone a sonné. Une femme pleure son mari et j’ai perdu mes mots dans sa douleur.

dimanche 27 septembre 2009

La théorie du parapluie

Chacun d’entre nous fait la pluie et le beau temps.
C’est ce que j’appelle la théorie du parapluie.
Il suffit qu’on en prenne un pour qu’il ne pleuve pas. Il suffit qu’on l’oublie pour qu’il se mette à pleuvoir.
La météo, c’est question d’optimisme, en somme.
Mais pas seulement, parce qu’avec les parapluies on n’est jamais à l’abri d’un pépin : baleine cassée, toilé retroussée, on a beau en avoir un sous la main, on n’est jamais sûr de rien.
A quoi ça sert donc ?
A rien.
Sauf que... Il y a une chose dont on est certain, s’il fait beau et qu’on a un parapluie, on ne sera pas mouillé. Et puisqu’un tiens vaut mieux que deux tu l’auras pas, il est préférable d’avoir deux parapluies quand il ne pleut pas, que pas de parapluie quand il pleut.
Mais si l’on a deux parapluies et qu’il ne pleut pas, on peut légitimement supposer que :
- plus il y a de parapluies, moins il pleut
- moins il y a de parapluies, plus il y a de soleil.
Et donc : moins il pleut, plus il y a de soleil.
CQFD.

jeudi 17 septembre 2009

Fatal error

Aujourd’hui j’ai pris le bus. Je voulais être dans le sens de la marche, histoire de pas avoir l’impression d’avancer à reculons. Seulement voilà, parfois, on choisit pas.
Et non seulement j’étais pas dans le sens de la marche, mais en plus le bus est parti bien plus tard que prévu. J’avançais donc en retard et à reculons, ce qui m’a valu une arrivée spatio-temporelle carrément décalée.
J’étais paumée en descendant. Je savais plus si je partais ou si je rentrais et c’est à peine si je savais où j’habitais.
Et puis je me suis demandé si le bus y était vraiment pour quelque chose. J’ai déménagé tellement souvent au cours de ces dernières années... J’ai traversé la France, de long en large, et j’ai fini par poser mes cartons ici. Mais aujourd’hui, je ne savais plus tout à fait où c’était ici. C’est comme si mon esprit avait buggué. Fatal Error. Out of memory. Please try later.
J’ai cherché la touche « reboot » de mon cerveau, j’ai pas trouvé. Alors je me suis posée un moment et j’ai observé le monde autour de moi. J’ai vu des canettes sur les trottoirs, des carcasses tôlées, des tours girafes. Et des avenues à perte de regard. J’ai repris la route, les idées buvard, l’humeur boulevard. Je savais où j’étais : Paris. C’est là ma vie.

lundi 7 septembre 2009

Souvenirs à l'étouffée

Je suis malade.
Je m’en suis rendue compte tandis que je remplissais mes cartons d’un milliard de choses futiles et inutiles. Tout et n’importe quoi : sous-bocks, photos, bouquins, ramequins, boîtes, stylos, cartes postales, post-its et j’en passe. Je n’ai rien pu jeter. J’ai essayé, plusieurs fois, l’appartement est petit et ça prend de la place des souvenirs.
Mais rien à faire.
Syllogomanie m’a dit google. Parait que certains malades ont accumulé tant d’objets qu’ils ont fini par mourir étouffés. Alors forcément, j’ai eu la trouille et j’ai déballé mes cartons. Non sans peine, j’ai réussi à balancer un vieux saladier ébréché, une ampoule cassée et une bougie anti-tabac. J’étais super fière de moi. Et puis je me souvenue que la bougie, c’était celle que m’avait offerte mon premier amour, un soir de Saint-Valentin. Je l’ai sortie de la poubelle, je pouvais pas jeter mes 17 ans à la corbeille. Et comme je n’ai pas réussi à me rappeler d’où venait le saladier, dans le doute j’ai préféré le garder. Je ne me suis finalement débarrassée que de l’ampoule. Et ça pèse pas lourd une ampoule. J’étais déjà vachement moins fière de moi.
Quand le déménageur est venu pour un dernier repérage, il a eu l’air surpris. Il avait estimé le volume à partir de la taille de l’appartement et des quelques meubles qu’il contenait. Il m’a demandé ce que j’avais mis dans mes cartons, en fronçant le sourcil gauche.
Des souvenirs, j’ai dit.
Il n’a pas baissé le sourcil mais a sorti un petit carnet et sa calculette. Tandis qu’il tapotait, je me disais que c’était probablement le genre de type qui avait dû jeter ses 17 ans à la corbeille le jour de son premier emménagement.
Il a inscrit une nouvelle somme dans son carnet, a arraché la feuille et me l’a tendue. Je la lui ai rendue en promettant de faire le tri. Je m’en fiche de payer plus, mais j’ai pas envie de mourir étouffée par mes souvenirs.